Jonathan Moncef Kibani Boussaleh

Jonathan Moncef a grandi entre le quartier de La Monnaie à Romans-sur-Isère et des Moulins à Nice, le tout en passant ses étés au Maroc, en famille. Il est dramaturge, metteur en scène, comédien et créateur lumière. Son spectacle Le Sbeul, est recompensé par le prix Marie-Paul Godenne. Ce travail l’incite à fonder un collectif du même nom centré sur un art politique et engagé. En 2023, il crée le spectacle As Salem Aleykoum, traitant d’identité et de frontière sur fond de victoire footballistique. Le collectif Le Sbeul est artiste associé au théâtre Le Rideau à Bruxelles.

Je veux refaire le parcours de mon grand-père - Allah y rahmo (paix à son âme)- de mes oncles et tantes, cousines et cousins. Je veux décortiquer ces histoires et les lier à d’autres récits pour faire sortir de ces rencontres une vérité.

Une sorte de vérité qui ne résume pas l'expérience des miennes et des miens à: “Ce sont des délinquants perdus d’avance violents et étrangers qui ont grandi en banlieue”.

Pour moi, ce qui compte c’est d’offrir un récit bétonné qui nous remette au centre, prendre le micro de Pascal Praud -enfin- pour dire une vérité devant un public rassemblé. Ou a minima, donner le moyen à d'autres de le faire.

C’est une quête d’identité. D’autodéfinition. Cette recherche désespérée est le propre du migrant, de la migrante et surtout de leur descendant·e·s.

(…)

Nous sommes la génération Gryffondor et Serpentard, Jedi et Sith, Coca, Pepsi; nous sommes colonisateurs et colonisés. Nos cultures se rejettent mutuellement et pour survivre, pour continuer à avancer, nous avons trouvé des stratégies afin d’apprendre à coexister. Nous sommes des laboratoires ambulants qui trouvent leur nécessité vitale dans la résolution des problèmes et des tensions que notre société rencontre aujourd’hui.
Ni plus ni moins.

Avant qu’on nous l’enseigne, nous savons intrinsèquement que l’histoire est écrite par les vainqueurs et avons déjà résolu en nous-mêmes ce conflit. Ou tout du moins, nous avons appris à regarder ce problème en face sans en avoir honte. Sans que la culpabilité nous trouble l’esprit et bloque nos réflexions. Nous sommes là pour oser, parler et questionner. Nous sommes d’ici et d’ailleurs et avons appris à nous penser en dehors de nos simples circonstances.

Voilà pourquoi aujourd’hui je veux écrire. Car si nous n’existons pas dans les récits que notre société produit ou pire encore si ces récits nous appauvrissent, alors les choses ne pourront jamais changer.